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Article des étudiants | Des “sous-doués” enseignent-ils le bac ?

Article des étudiants | Des “sous-doués” enseignent-ils le bac ?

Si on pouvait avoir son bac en travaillant, ça se saurait depuis longtemps. » Ces paroles du film Les Sous-doués passent le bac peuvent paraître naïves. Mais pour être bachelier dans une société où le niveau scolaire est en baisse, la qualité des professeurs et de leur formation semble primordiale. Quoi de plus barbant qu’une leçon lue de manière monotone avec un bruit de fond résultant d’un manque de discipline dans une classe ne prêtant pas intérêt. Pourtant, c’est bien la réalité des collèges et lycées français. Les enseignants – et surtout les plus jeunes –, n’ont jamais été autant en difficulté que depuis ces dernières années. Le nombre de démissions le prouve, en particulier celui des stagiaires : 65 en 2012-2013 avec une augmentation à 434 démissions quatre ans plus tard. On peut se demander si la formation des professeurs est à la hauteur des obstacles qui les attendent.

 

Un parcours du combattant… vide de sens

Pour devenir professeur en France, le candidat passe, après trois années de licence, un master « métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation ». Il choisit ensuite une section : petite enfance (pour l’école primaire) ou secondaire (collège et lycée) avec une spécialisation selon la matière enseignée. Les étudiants qui s’engagent dans ces masters passent à la fin de l’année un concours qui leur donne la titularisation nécessaire pour enseigner. Les inscriptions laissent transparaître un recul des jeunes à vouloir s’engager dans l’enseignement. En 2020, le nombre d’inscrits au concours du CAPES a reculé de 7,8 %. Marie, élève en Master MEEF Histoire-Géographie, partage cette appréhension : « Je me demande si le métier que je convoite est un environnement sain. Après cinq ans d’études, je recherche une certaine qualité de vie et un plaisir d’instruire. Je me demande pourquoi devenir professeur ? Les conditions d’enseignement sont de plus en plus dures, surtout pour les jeunes profs ! »

Dans ces cursus, on apprend les méthodologies du concours, les matières enseignées, le programme scolaire et des matières plus larges jugées parfois hors sujet. La jeune étudiante confie que « de la sociologie, philosophie et psychologie sont proposées mais cela reste très théorique, ce que je déplore ».

Certains travaux sont à passer à l’oral mais cela est-il suffisant pour préparer à faire cours face à une classe de 20 à 30 élèves ?

 

Des candidats qui ne sont pas dupes

Léa Mayoud, étudiante en MEEF Anglais, reste lucide sur son futur professionnel : « On sait très bien que ce qui nous est enseigné n’arrivera pas nécessairement en classe. Dans les moments les plus délicats, il faudra faire preuve de sang-froid et de pédagogie pour s’en sortir, car les formations restent très théoriques, forcément un peu en marge de la réalité. »

Pour l’année scolaire 2018-2019, une enquête du SNUipp-FSU, principal syndicat d’enseignants du primaire, dévoile que 85,7 % des professeurs stagiaires considèrent ne pas avoir été assez préparés à avoir la responsabilité d’une classe. Toujours dans cette enquête, 69,5 % des stagiaires estiment ne pas avoir les connaissances nécessaires pour la pratique pédagogique et la gestion de classe. La future enseignante Marine Gardon confirme : « La première année est consacrée au concours. Les épreuves sont très scientifiques. La gestion d’une classe n’est pas enseignée, le programme du CAPES est lourd et la quantité de connaissances attendues uniquement pour le concours fait tourner la tête. » Reste une question : la gestion d’une classe peut-elle s’apprendre autrement que par l’expérience du terrain ?

Le gouvernement semblait avoir pris conscience de cette problématique : c’est l’objet de la réforme
pour 2021. Mais au lieu de permettre aux stagiaires de passer plus de temps avec des classes, de travailler leur aisance orale ou la gestion d’un groupe, le ministre Blanquer préfère réduire les stages sur le terrain pour la dernière année de master et renforcer les matières conceptuelles.

« J’ai passé mon master entre 2015 et 2017 et je pense qu’il faut changer la mentalité de ceux qui nous forment, le discours est trop démagogique. Il faut remettre le professeur au centre de la classe » réclame Pierre Fouilloux, professeur de Sciences Economiques et Sociales.

A l’heure où les professeurs peuvent mourir d’enseigner, à l’image de Samuel Paty, n’est-il pas urgent que tous les logiciels de formation soient revus au sein de l’Education nationale ?

 

Maryse Venard,
étudiante en Bac+4 à l’ISSEP
publiée dans Présent