Entretien de Pierre Meurin avec le journal Présent
Entretien avec Pierre Meurin, directeur des études à l’ISSEP
Confronter convictions et savoirs au réel
Avant de devenir directeur des études à l’ISSEP, Pierre Meurin – juriste de formation et jeune père de famille de 29 ans – a été directeur de cabinet pendant trois ans dans une commune divers droite de 10 000 habitants. Entretien à quelques jours de la deuxième rentrée de l’institut.
Propos recueillis par Samuel Martin – samuel-martin@present.fr
— Soyons concrets : combien d’étudiants vont faire leur rentrée début octobre, en 1ère et 2ème années ?
— Pour l’année universitaire 2019-2020, la formation initiale de l’ISSEP s’agrandit. Nous ouvrons en effet une deuxième classe, qui portera l’effectif total autour d’une trentaine d’étudiants, lesquels ont soigneusement été sélectionnés selon leur curiosité intellectuelle, leurs qualités académiques et leur adhésion aux valeurs d’éthique, d’enracinement et d’excellence que nous portons. Ceci nous permettra de poursuivre notre pédagogie à taille humaine ; d’entamer un cycle de consolidation et de développement, qui doit nous conduire à faire de l’ISSEP un acteur majeur de l’enseignement supérieur dans les prochaines années.
— Est-il encore temps de s’inscrire ? Et si oui, suivant quelles modalités ?
— Bien que la rentrée approche (1er octobre), il est toujours possible de présenter sa candidature, en magistère 1 sous condition de licence, ou en magistère 2 en admission parallèle avec un bac +4. Il convient pour cela de se rendre sur notre site internet, de télécharger le dossier de pré-inscription à nous retourner par courrier, augmenté des pièces justificatives demandées. Cette formalité remplie entraîne une convocation rapide aux épreuves d’admission : un écrit d’une heure (culture générale, synthèse croisée d’articles de presse) et un entretien de motivation devant un jury. Il n’est donc pas trop tard ; il ne faut pas hésiter : les équipes administrative et pédagogique facilitent les démarches des étudiants admis. C’est l’avantage de nos effectifs à taille humaine.
— En tant que directeur des études, vous veillez à ce que les étudiants travaillent et s’impliquent. Etes-vous satisfait des résultats de l’année 2018-2019 ?
— L’ensemble des étudiants de la première promotion ont passé avec succès les épreuves de première année ; je suis donc satisfait d’un point de vue académique, même si je ne peux m’empêcher de penser (et de dire) que certains auraient pu faire bien mieux. Mais une formation d’excellence, qui prétend consacrer sa pédagogie au développement complet des facultés humaines, ne se contente pas de notes sur 20. L’ISSEP exige de ses étudiants une confrontation de leurs convictions et de leurs savoirs au réel. De ce point de vue également, je suis très satisfait, car tous les étudiants, dans la diversité de leurs parcours, ont forcé leur nature : certains ont considérablement amélioré leurs qualités rédactionnelles pour publier de vrais articles dans la presse (dans Présent entre autres) ; d’autres, plus littéraires, ont acquis la méthodologie du business plan et se sont découvert une appétence pour l’entrepreneuriat ; d’autres enfin, plus introvertis, ont tiré profit des cours de prise de parole en public, de media training ou même de danse pour acquérir de la confiance et viser un engagement politique ou associatif. Tout ceci est possible grâce à la camaraderie et l’esprit d’équipe qui règne dans notre promotion Loustaunau-Lacau. Je ne doute pas qu’il en sera de même pour notre deuxième promotion.
— Chargé de la cohérence et de la qualité de l’enseignement, comment vérifiez-vous concrètement ce point ?
— En étant curieux intellectuellement, c’est-à-dire en m’obligeant à avoir un avis sur des matières très diverses. Je peux vous dire que j’en apprends, des choses ! De façon concrète, bien en amont de la rentrée, c’est-à-dire au mois d’avril dernier, nous avons demandé à nos enseignants de remplir un syllabus, dans lequel ils indiquent le résumé de leur cours, leur bibliographie et le plan de chaque séance. Dès réception de tous ces documents (une bonne quarantaine tout de même), je me suis attaché à corriger les doublons qui pouvaient se glisser parfois entre les matières pouvant se recouper ; à mettre en contact les enseignants de chaque pôle académique pour une coordination optimale. Je communique beaucoup avec les enseignants, et tente de trouver le bon équilibre entre les exercices pratiques pour les matières opérationnelles (management, communication, comptabilité…) et les exercices plus classiques pour les matières théoriques telles que l’histoire des idées politiques par exemple. Tout ceci se fait en coordination avec les professeurs qui sont, à l’ISSEP, investis d’une réelle liberté pédagogique, sachant qu’ils ont tous une grande expérience de l’enseignement à haut niveau (par exemple, 17 de nos enseignants sont titulaires d’un doctorat). Me concernant, cette année, je compte monter un groupe de réflexion sur la façon dont l’ISSEP pourrait devenir un acteur de l’innovation pédagogique au XXIe siècle.
— A la fin de leur 2e année, les étudiants entreront dans la vie professionnelle. En quoi leur formation à l’ISSEP les distinguera-t-elle des autres sur le marché du travail ?
— Cette question, bien entendu fondamentale puisque c’est sur ce point que nos résultats seront analysés dès l’année prochaine, me donne toujours envie de citer Michel Audiard, si vous me le permettez : « Nous sommes gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis. » Ceux que l’on appelle génériquement les « élites » ont trop souvent été formés dans une certaine forme d’arrogance intellectuelle consistant à vouloir appliquer des schémas préétablis pour dominer le réel, même lorsqu’il est récalcitrant. Par exemple, l’abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes secondaires est un cas d’école de cette arrogance intellectuelle propre à certaines élites métropolitaines ! Nos étudiants apprennent à faire l’inverse : devenir des responsables patients et créatifs qui prendront des décisions selon ce processus d’apprivoisement du réel – dans l’ordre : intuition, observation, écoute, analyse, décision, conception. L’ISSEP souhaite « dé-technocratiser » la prise de décision et réhabiliter le bon sens, que ce soit dans une entreprise ou dans la vie politique. C’est ceci qui fondamentalement distinguera les diplômés de l’ISSEP d’autres candidats à la vie active, puisqu’ils disposeront comme eux d’une formation analogue classique mais brillante en sciences politiques et en management de projet, avec en outre un sens profond du bien commun et un enracinement culturel, familial, national.
— L’ISSEP se veut une école d’excellence. Qu’est-ce que cela implique pour le directeur des études que vous êtes ?
— De me mettre au diapason ! Je fais partie d’une équipe qui a fait le pari de casser les codes de l’enseignement supérieur. C’est ambitieux, et de nombreux obstacles se dressent sur notre route. Nous avons donc le devoir de donner le meilleur de nous-mêmes, pour que ce projet réussisse. Mais je suis optimiste et enthousiaste : le travail effectué par les équipes administrative, enseignante et pédagogique, dans l’angle mort des radars médiatiques, me convainc chaque jour de la solidité de nos fondations. Je suis animé par la phrase du regretté Michel Menu : « Si tu veux être chef un jour, pense à ceux qui te seront confiés. Si tu ralentis, ils s’arrêtent. Si tu faiblis, ils flanchent. Si tu t’assieds, ils se couchent. Si tu critiques, ils démolissent… Mais si tu marches devant, ils te dépasseront. Si tu donnes la main, ils donneront leur peau. Et si tu pries, alors, ils seront des saints. » C’est cela, l’excellence.